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17 octobre 2016 1 17 /10 /octobre /2016 23:11

Le professeure Carole Ichai est cheffe du service réanimation au CHU Pasteur 2 de Nice et revient sur ce qui l'a marqué la nuit de l'attentat du 14 juillet à Nice.

L'horreur et la peur que l'on pouvait lire sur le visage des gens qui arrivaient à l'hôpital. Mais aussi la solidarité de toute la profession médico-soignante avec un vrai travail d'équipe et un investissement de tous. Le travail fourni sur plusieurs heures a été considérable. Nous savions qu'il y avait eu un accident sur la promenade des Anglais impliquant un camion et de nombreux morts. Mais lorsqu'on soigne un patient, on fait abstraction de tout ce qu'il y a autour pour se concentrer sur notre métier et sauver des vies. Dans ces moments-là, nous avons des réflexes qui nous permettent d'avancer. C'est après que le contexte remonte à la surface

Les types de blessures rencontrées:

De nombreux blessés souffraient de polytraumatismes graves. Nous connaissons ce type de patients mais nous n'en avions jamais reçus en nombre aussi important dans une période aussi courte. Les blessures étaient différentes des attentats de Charlie Hebdo et du 13 novembre qui concernaient essentiellement des plaies par balles. Au CHU Pasteur de Nice, nous avons pris en charge des écrasements de membres, du bassin, de l'abdomen, du thorax, des traumatismes crâniens, et très souvent, plusieurs traumatismes combinés. Ce sont des blessures de guerre aussi mais la prise en charge est un peu différente. Dans le cas d'une plaie balistique au ventre par exemple, les patients sont directement emmenés au bloc opératoire et opérés. Mais quand on est face à des blessures comme celle du 14 juillet à Nice, il faut d'abord faire le point car avant d'opérer, on ne sait pas quelles lésions nous allons trouver. Il y a une priorisation à faire, les principaux organes vitaux peuvent être touchés. 

Le choc des soignants:

Sur le plan psychologique, c'est après coup que les choses sont un peu plus compliquées. Beaucoup de soignants ont développé un stress post-traumatique. Certains étaient sur place le soir-même et en ont réchappé. D'autres ont eu à gérer des situations inédites. Comme les manipulateurs radio, qui, pour l'identification des morts, ont dû passer plus de 80 corps dans un scanner. Dans les 48 heures qui ont suivi, nous avons débriefé au sein du service car il y avait une demande très forte du personnel. Par la suite, le suivi a été individualisé en fonction des réactions de chacun. On n'est pas préparés à ça, à être confrontés à autant de blessés, à voir l'horreur en masse. Même si l'on parvient à se protéger, c'est impossible de faire abstraction de tout. 

 

 

 

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